À l’automne de cette année, Félix Vallotton sera à l’honneur aux Galerie nationales du Grand-Palais, à Paris, pour une rétrospective majeure de son œuvre. Félix Vallotton (1865-1925). Le feu sous la glace suit de quelques années seulement celle qui fut dévolue, au Musée d’Orsay, à un autre maître de l’art suisse, Ferdinand Hodler.
Le Musée d’art et d’histoire a choisi de contribuer largement à cette manifestation – une participation exceptionnelle qui se traduira par de très nombreux prêts. Il est vrai que notre institution conserve dans ses collections un fonds majeur de l’artiste: vingt-et-une peintures, vingt dessins et la quasi-totalité de l’œuvre gravé et lithographié. De ce fonds, le Musée d’art et d’histoire a accepté de prêter sept tableaux, quinze gravures et un album. C’est ainsi que la salle aujourd’hui encore consacrée à Vallotton à l’étage des beaux-arts devra faire l’objet d’une nouvelle présentation dès septembre, la plupart des œuvres (souvent de grand format), telles que La Haine, Orphée dépecé par les Ménades, Le Bain turc ou encore Persée tuant le dragon, ayant été retenues par les commissaires de l’exposition parisienne.
Né à Lausanne, celui que d’aucuns nomment le «très singulier Vallotton» ou le «Nabi étranger» se rend à Paris à l’âge de dix-sept ans déjà où il s’inscrit à l’Académie Julian; il ne reviendra que ponctuellement en Suisse, gardant toutefois des liens étroits avec certaines personnalités de la région et continuant d’exposer dans des manifestations locales. À Paris, il se lie d’amitié avec Édouard Vuillard, Pierre Bonnard et Maurice Denis, rejoignant leur groupe des «Nabis» et devenant l’illustrateur principal de La Revue blanche. Peintre de formation, il s’initie en effet tôt à l’art de l’estampe (eau-forte, pointe sèche, lithographie et xylographie) et développe une activité très riche dans ce medium jusqu’au début du XXe siècle. C’est un véritable renouveau qu’il insuffle à cette technique, réalisant des planches d’une étonnante modernité, à l’instar de la série Intimités, un ensemble prêté dans son entier pour la manifestation de l’automne. En 1899, son mariage avec la fille du marchand de tableaux Alexandre Bernheim marque un tournant dans sa vie et dans sa carrière; il se consacre dès lors essentiellement à la peinture.

C’est au portrait qu’il dédie principalement son travail de jeunesse, s’ouvrant par la suite aux thématiques du paysage, des scènes d’intérieur, du nu ainsi qu’aux sujets mythologiques ou allégoriques. S’il ne rompt certes jamais avec la tradition – portant aux nues et s’inspirant de maîtres tels que Nicolas Poussin, Jean-Auguste-Dominique Ingres ou Rembrandt –, il développe un style personnel, fait de cadrages audacieux, de compositions serrées et acérées, de jeu des contrastes. Sa palette, tantôt sourde, tantôt éclatante, crée un effet parfois irréel.
La femme est un thème majeur dans son œuvre. Elle règne par sa présence sur près de cinq cents tableaux (sur les mille sept cents contenus dans son catalogue peint), sans compter mythologies, allégories ou scènes d’intérieur où elle apparaît également. L’ensemble des prêts accordés par le Musée d’art et d’histoire reflète son intérêt pour la représentation picturale de la figure féminine, donnant à voir sa fascination en même temps que sa circonspection vis-à-vis de celles qui prend tantôt les apparences d’une créature menaçante tantôt d’un être plus accessible, parfois lascif.
L’exposition Félix Vallotton (1865-1925). Le feu sous la glace se tiendra aux Galeries nationales du Grand-Palais, 2 octobre 2013 – 20 janvier 2014 avant de s’envoler à Amsterdam puis à Tokyo.